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Biennale Internationale de l'Image . Liege 2004

Valérie Belin » Laëtitia Bica » Collectif IMA » Robert Doisneau » Andreas Gefeller » Bruce Gilden » Zaïda Gonzalez Rios » Jean Janssis » Clemens Kalischer » Josef Koudelka » Ruud van Empel » Erwin Wurm » Dana Wyse » & others

Festival: 14 Feb – 31 Mar 2004

Centre Culturel Les Chiroux

place des Carmes 8
4000 Liège

Centre Culturel de Liege - Les Chiroux

place des Carmes 8
4000 Liege

04-2509436


www.chiroux.be

Mon-Sat 13-18

On le savait, on pouvait lui faire confiance. On pouvait y aller de gaieté de cœur : toujours au galop, le naturel reviendrait. Le naturel était résolument fiable. Et puis ce retour a commencé à montrer des signes de faiblesse : ce qui revenait n'était plus tout à fait le même. Il revenait moins vite ; il revenait surtout sous d'autres formes ; c'est d'ailleurs à peine si on pouvait le reconnaître. Certains ont même commencé à douter, non seulement que le naturel revienne une fois de plus-- il n'y aurait bientôt plus de nature -- mais pire encore, que cette défection ne soit justement le signe que nous nous étions trompés : il n'y aurait jamais eu de nature. " Chasser le naturel " a dû alors prendre un autre sens et organiser une tout autre mission : il s'agit certes toujours de le chasser, mais cette fois non plus pour le faire partir. Il s'agit à présent de le traquer, de le poursuivre pour le retrouver et le rappeler. Il a fallu toutefois se rendre à l'évidence : cette nature qu'il s'agit d'empêcher de déserter ne noue plus avec l'ancienne que de lointains liens de ressemblance. Ainsi, ce qui semblait au mieux la définir, cette ancienne division des humains et des choses, cette répartition claire entre ce qui est cultivé et ce qui est produit sans intervention humaine apparaît ne plus pouvoir aussi bien tenir. Tout est plein de dieux, disaient les anciens. Tout est plein d'humains répondent les modernes. Tout est plein d'humains qui échangent avec les êtres et les choses leurs propriétés. Tout est plein d'humains s'évertuant à retrouver, dans la nature, celles de ces propriétés qu'ils disent avoir perdues, tout en proposant, dans le même geste, à ces êtres de nature de recevoir celles qu'ils pensent avoir gagnées en devenant humains. Les chimpanzés, comme certains oiseaux ont acquis la culture -- on leur a même offert de parler ; les cigognes et les baleines sont équipées de balises qui nous permettent de suivre leurs voyages -- elles nous inventent de nouvelles géographies. La nature est devenue une nature humaine : il n'y a pas une réserve naturelle qui ne soit soigneusement clôturée, domestiquée, inscrite dans un projet humain ; pas un environnement qui n'ait fait l'objet d'un repérage, d'une cartographie, d'un envahissement ou d'une protection. La nature à laquelle l'homme de culture se devait de s'arracher est devenue ce à quoi il s'agit aujourd'hui de mieux s'attacher. Natures humaines et humaines natures sont aujourd'hui tissées de la même étoffe. On ne retrouve plus les coutures. Chassez le naturel, certes il reviendra. Les témoignages abondent. Mais il revient sous d'autres formes, inédites, surprenantes, humaines, dénaturées et réinventées ; parfois sous le signe de l'humour, parfois sous celui de la tristesse ou de la tragédie. Les chasseurs de naturel sont ici des chasseurs d'images qui témoignent autant qu'elles font exister. Les chasseurs de naturel explorent patiemment la frontière démantelée entre nature et culture, artifice et authenticité, extériorité et intériorité, humains et non-humains. Ils disloquent les tiroirs de nos vieilles catégories. Regardez : des fleurs qui étouffent un papier peint, un poisson rouge myope derrière le verre grossissant de son bocal, une plante désolée, un chien avec un chapeau à qui l'on a envie de parler. Regardez encore : un cochon qui nous observe, un paradis terrestre entre deux tours de métal, une vache qui vient de mourir ; un agneau qui porte sur la peau le numéro de son destin, deux poules d'une nature très morte, des corps humains dans une nudité habillée de leur seule histoire, des lignes de béton qui empruntent aux plantes les gestes de leur chorégraphie vers le ciel. Regardez bien ces étranges natures qui sont aujourd'hui les nôtres. Et qui reviennent, autant pour nous proposer de les habiter que de nous habiter.