Stéphane Duroy
"AGAIN AND AGAIN"

Exhibition: 6 January – 9 April, 2017

The exhibition is being extended at LEICA
105-109 rue du Faubourg Saint-Honoré, 75008 Paris
5 January – 8 April, 2017

What if Stéphane Duroy’s work was an exile? After forty years of obsessive wandering in the footsteps of old Europe as far as the United States, Stéphane Duroy today seems pushed by a wind of renewal, towards a photographic praxis taken ever further from itself.

"L’Europe du silence", a ground-breaking work embarked upon by the photographer in the 1980s, comes across as an attempt to set out to encounter great History. Constructed in a long-term movement, this series records the vision of man in search of his identity and the memory of an Europe shaken by two world wars and many different totalitarian aberrations.

Since 1977, he has also been facing up to another reality, that of the human factor, of people left out, workers and dropouts plunged into the distress of a Thatcherite Britain undergoing profound changes. The book "Distress", which was published late in 2011, is the culmination of an immersion spanning more than 30 years in a profoundly battered country.

Stéphane Duroy’s eye is gradually swerving. Towards the United States, land of exile for millions of Europeans who fled Europe and its tragedies. From Coney Island to Butte, in Montana, Stéphane Duroy tirelessly criss-crosses the migrants’ symbolic path. Their further penetration from east to west in the American territory tallies with the progressive oblivion of the first catastrophe that made exile necessary. Forgetting in order to continue, and survive. For Stéphane Duroy, this relentless disappearance of landmarks, the ravages of the pioneer spirit, the cult of opportunism and the mirage of "everything’s possible" founded the power of America and the same time are undermining it. "We, Europeans, have built the American Dream, that monumental illusion which each one of us pretends to believe in." Stéphane Duroy will never be done with America, that accursed part of himself. He will be forever returning there, enamoured of those lands with their wild glare and their mournful beauty.

In 2007, his book "Unknown" appeared. Stéphane Duroy got his hands on a hundred or so copies, which would then form the main material of his work in which he can hew: paste, edit, cut out, split an image, slip in others, break down the space of the page and put it endlessly back together again. And open up a yawning gap between what has been seen and what has been imagined. Everything returns, is re-enacted, recycled and reborn in books, like objects to be tested, exhausted, methodically, one after the other. Gradually an archaeology of memory is constructed, a deposit of raw materials which resist and escape, from the narrative, from the rendering, from the link. Well beyond the photograph. As witness to a world that has become hard to breathe in, Stéphane Duroy uproots his language. (Text : Fannie Escoulen and Diane Dufour)

Stéphane Duroy
"AGAIN AND AGAIN"

Exposition: 6 janvier au 9 avril 2017

L'exposition se prolonge chez LEICA
105-109 rue du Faubourg Saint-Honoré, 75008 Paris
5 janvier au 8 avril 2017

Et si l’œuvre de Stéphane Duroy était un exil ? Après quarante années d’un périple obsessif sur les traces de la vieille Europe jusqu’aux États-Unis, Stéphane Duroy semble aujourd’hui poussé par un vent de renouveau, vers une pratique photographique emmenée toujours plus loin d'elle-même.

"L’Europe du silence", travail fondateur initié dans les années 1980, s'impose comme la tentative, décisive dans son parcours, de partir à la rencontre de la grande Histoire : Douaumont, Berlin, Auschwitz, Lodz… Construite dans un mouvement au long cours, cette série consigne la vision d’un homme à la recherche de son identité et de la mémoire d’une Europe ébranlée par deux conflits mondiaux et de multiples dérives totalitaires. Stéphane Duroy en livre un récit fragile, emprunt de poésie et d’inquiétude, dont l'esthétique granuleuse et opaque se mêle au poids du temps et aux silences obscurs des paysages. Paraît en 2000 le livre du même nom, épuré et radical, en 20 images.

Depuis 1977, il affronte aussi une autre réalité. Celle de l’humain, des laissés pour compte, des ouvriers et des marginaux plongés dans la détresse d’une Angleterre Thatchérienne en pleine mutation. Le livre "Distress" (paru tardivement en 2011), est l'aboutissement d'une plongée de plus de trente années dans un pays profondément meurtri.

Progressivement et inexorablement, le regard de Stéphane Duroy se déporte. Sur les traces des exilés européens, il se tourne vers leur terre d’accueil, les États-Unis, réceptacle d’une mémoire collective fuyant les stigmates de son passé. De New York au Montana, il marche alors sur les pas d’immigrés arrivés en Terre promise en quête de nouveaux départs. Confronté à une version désenchantée du « rêve américain », il rapporte des images d’une grande mélancolie et d’une extrême sobriété, et publie en 2007 le livre "Unknown". Dans ce va-et-vient permanent entre une Amérique qu’il ne cesse d’ausculter et l’Allemagne, cœur de ses obsessions, Stéphane Duroy construit son imaginaire.

À partir de 2009, il se détache peu à peu de la photographie et met en place un autre processus de travail : collages, coupures de presse, photographies anonymes, peintures, ratures et déchirures, viennent nourrir et malmener des dizaines d’exemplaires de son livre Unknown, l’aidant à dépasser une surface photographique devenue trop pauvre à son goût. Par ce geste quotidien de destruction et de reconstruction, par l’ajout de couches de matières successives, il procède, tel un palimpseste, à un effacement de l’image. Ces livres-objets deviennent les catalyseurs de ses obsessions. Cette tentative d’épuisement du livre et de ses propres images permet à Stéphane Duroy d’aller au-delà de sa photographie, d’en casser les codes et d’explorer de nouveaux territoires d’expression. Témoin d’un monde devenu irrespirable, il déracine son langage. (Texte : Fannie Escoulen and Diane Dufour)