« Penser l'image, c'est répondre du destin de la violence » Marie-Josée Mondzain (1) Cette exposition présente un ensemble de captures d'écrans d'extraits télévisés, illustrant les événements de ce véritable feuilleton télévisuel que fut à l'époque la Guerre du Golfe. Le propos n'est évidemment pas de raconter ce que fut cette guerre. Le choix de la Guerre du Golfe, légèrement décalé dans le temps, déjà historique, permet de se positionner intelligemment en retrait de l'actualité. Le choix de Michel LeBrun-Franzaroli est de revenir sur les questions posées par les images diffusées, sur ces séquences télévisuelles intemporelles-insituables, censées relater un événement pourtant daté et localisé. Bien qu'exclues des champs d'opération, ne pouvant filmer en direct, les télévisions diffusèrent tout de même des images, car cela était non seulement nécessaire, mais posait le fondement de leur légitimité. Comment avons-nous été informés ? L'artiste présente un ensemble saturant de captures d'écran et de reportages diffusés à l'époque, et nous immerge dans une soupe médiatique mettant en relief l'interrogation d'une impossible information lorsque les enjeux politiques se font écrasants. Le très important agrandissement des images provoque une dégradation qualitative, l'apparition de déformations parasites qui expriment le malaise, la manipulation, les mensonges sous-jacents qu'il faut mettre en rapport avec la «qualité » de l'information diffusée. L'image est dépréciée, salie, illustrant la faible qualité sémantique du discours et faisant pour alors ressortir la véritable esthétique de l'image. Cleptomane de l'image, Michel LeBrun-Franzaroli s'intéresse aux images médiocres de grande diffusion. Perturbant la temporalité de ces images, ils les soustrait à toute tentative univoque et rend au spectateur sa puissance critique de jugement. Le constat de la dilution du pouvoir est inévitable. Qui est l'auteur de la guerre ? Qui est l'auteur de l'image ? Qui est l'auteur de l'oeuvre ? L'artiste pointe ici le difficile statut de l'image numérique. (1) in L'image peut-elle tuer ? Marie-Josée Mondzain, Editions Bayard, 2002 ___________ english ___________ « To think the Image is to answer for the fate of violence » Marie-Josée Mondzain (1) This Exhibition presents a set of screen scrapings taken from TV news & illustrating the elements of a veritable television serial: the presentation of the First Gulf War. Now we certainly did not set out to tell the truth about that war. The choice of the First Gulf War, so far away in time & already belonging to History, allows us to sensibly take a stand while standing back from current affairs. Michel LeBrun-Franzaroli has chosen to reexamine questions as may be asked from broadcast pictures, from these apparently timeless and unlocated television sequences, supposed to relate an event which was nevertheless duly dated and located. Although excluded from the battlefield, television networks, being unable to broadcast 'live', still had to transmit pictures – this being not only necessary, but their ultimate justification. How were we in fact informed ? The Artist presents a saturating set of screen scrapings and reports as broadcast at the time, and we are thus submerged into a media 'soup' which elicits questioning how inaccessible information becomes when political stakes are overwhelming. A visual kleptomaniac, Michel LeBrun-Franzaroli takes a keen interest in wide circulation second-rate pictures. While disrupting their succession in time, he shields them from any biased endeavour and restores the viewer's critical power of judgment. The conclusion that power becomes diluted is inevitable. Who is the author of the war ? Who is the author of the image ? Who is the author of the work ? Here the Artist points out the difficult status of digital images. (1) in L'image peut-elle tuer ? [Can images kill ?], Marie-Josée Mondzain, Editions Bayard, 2002